Pollution lumineuse, quel impact sur la flore ?

À l’heure où les agglomérations s’interrogent sur l’incidence lumineuse de l’éclairage urbain et des enseignes commerciales, les motivations de préservation faunistiques sont souvent mises en avant et masquent parfois des intérêts principalement économiques.
Quoi qu’il en soit, l’impact de l’éclairage artificiel sur la flore est rarement pris en compte. Il est pourtant bien réel et souvent lié aux incidences de la pollution lumineuse sur la faune.

Les travaux du Centre d’écologie et des sciences de la conservation (CNRS/MNHN/UPMC) et de l’université de Bern ont démontré les impacts négatifs de la lumière artificielle sur la pollinisation des fleurs (Knop et al., 2017)
L’étude comparative réalisée sur des fleurs de prairie éclairées artificiellement a mis en évidence une diminution de 62% des visites de pollinisateurs nocturnes par rapport à des prairies sans pollution lumineuse avec comme conséquence une réduction de 13% de la production de fruits (démonstration sur Circe maraîcher en dépit des visites de ses pollinisateurs diurnes).

Lanterns illuminate alleys in a night park

Les effets de la pollution lumineuse sur le processus de floraison

La pollution lumineuse est un phénomène qui découle de l’utilisation d’éclairages artificiels qui, de nuit, produisent un halo lumineux à plus ou moins grande échelle selon le nombre de sources lumineuses et les systèmes d’éclairage utilisés. La diffusion de la lumière peut être amplifiée par les conditions atmosphériques. L’utilisation de ces éclairages nocturnes sur des laps de temps longs, impacte fortement la faune et la flore présente à proximité. Beaucoup d’espèces sont en effet sensibles au cycle circadien (alternance du jour et de la nuit). La durée de ces cycles déclenche de nombreux processus biologiques affectant le développement des plantes. Les lumières artificielles nocturnes affectent le processus de floraison des plantes, notamment en changeant la durée du jour et de la nuit, impactant ainsi le développement des plantes, en particulier le moment de floraison des plantes à jours courts.
Dès lors que le calendrier de floraison est modifié, ces plantes doivent faire face à des problèmes de reproduction et de pollinisation.
D’une part, il peut y avoir décalage entre la nouvelle temporalité de floraison induite par la pollution lumineuse et la présence des pollinisateurs de cette plante.
D’autre part, les plantes qui éclosent principalement la nuit et qui sont dépendantes de cette obscurité pour attirer des pollinisateurs nocturnes, tels que les papillons de nuit et certains coléoptères, peuvent rencontrer des difficultés de pollinisation (ouverture de la fleur décalée ou trop limitée dans le temps).

Public lamp amid the vegetation of a public square in Brazil

Les effets de la pollution lumineuse sur la pollinisation

Plus étudiés, les effets de la pollution lumineuse sur la faune démontrent une perturbation des comportements naturels et des cycles de vie des insectes nocturnes en particulier. Ces effets agissent de manière indirecte sur le processus de pollinisation.
Désorientés par la luminosité artificielle qui les attire, les insectes pollinisateurs peuvent éprouver des difficultés à trouver leurs sources de nourriture, notamment le pollen des fleurs. La conséquence est un affaiblissement des pollinisateurs, voir une baisse d’effectifs avec des répercussions sur l’entièreté de la chaîne alimentaire.
Chez les plantes, la répercussion se mesure par une baisse de pollinisation, et par extension de la fructification et reproduction.
La lumière artificielle peut également être un attrait pour les insectes ravageurs, telle la pyrale du buis contre laquelle il est conseillé de supprimer toute source lumineuse nocturne. Certains pièges contre le ravageur utilisent d’ailleurs une source lumineuse.

Les effets de la pollution lumineuse sur la dormance

Les arbres situés à proximité directe des lampadaires perdent souvent leurs feuilles plus tard que ceux situés dans les zones éclairées naturellement. D’autres processus comme le ralentissement de la croissance et la mise en dormance, découlant naturellement du raccourcissement de la durée des jours, sont des mécanismes nécessaires pour la protection des arbres contre les effets de l’hiver. Les conséquences de ce retard dans le processus biologique sont une sensibilité accrue aux gelées et un affaiblissement global des végétaux, les rendant plus sensibles aux pathogènes.

Le surplus d’éclairage artificiel a aussi un effet sur le débourrement et la floraison qui surviennent plus tôt dans la saison. Il y a un risque plus important d’effets des gelées précoces sur le développement de la fleur, mais aussi un décalage entre la maturité des fleurs alors que leurs pollinisateurs ne sont pas encore présents.

Que faire à notre niveau ?

Faire les bons choix d’éclairage :
Nous pouvons tout d’abord proscrire les éclairages en contre-plongée (désormais interdits dans de nombreux contextes en dehors de la mise en valeur du patrimoine ou de l’éclairage des parcs et jardins) et privilégier les luminaires orientés vers le sol pour améliorer la condition des pollinisateurs et indirectement celle de la flore.
Dans une moindre mesure, éviter les sources lumineuses à spectre bleu (au-delà de 3000 K), qui sont les plus nuisibles pour la faune comme pour la flore, et opter pour des luminaires extérieurs conçus pour minimiser la dispersion de la lumière (les ampoules LED permettent une bonne gestion de l’intensité).
Un arrêté du 27 décembre 2018 concernant la limitation des nuisances lumineuses précise les limites applicables selon les usages et le contexte. Dans certains cas, le texte impose l’extinction pendant des plages horaires déterminées. Les constructeurs ont depuis développés des solutions de programmation des luminaires, de détection et de télégestion.
Pour ce qui est du parc éclairant plus ancien, avec parfois des points lumineux très haut avec une densité surfacique du flux trop importante, des adaptations de coupe-flux sont parfois envisageables.
Néanmoins, la meilleure solution reste la diminution du nombre de points lumineux qui sont tous impactants pour les cycles de reproduction et de développement des végétaux.

Sensibiliser et informer :
Sensibiliser votre entourage et votre commune aux impacts de la pollution lumineuse et à l’utilisation de bonnes pratiques permet d’encourager les mesures visant à réduire notre impact.

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